César Manrique : le plus universel des « conejeros » (hab. de Lanzarote)
17/08/2016
Si on vous propose une collaboration journalistique avec les gestionnaires et les promoteurs des CACT, et que de surcroît vous êtes natif de Lanzarote, vous ne pouvez que commencer par le début.
Alors, comme vous êtes aussi un enfant du village, vous devez toujours avoir très présent à l’esprit qui est l’hôte de la maison où vous vous rendez. Et ici, dans cette structure dédiée à la culture, l’art, l’architecture, au tourisme et à la nature, colonne vertébrale de la municipalité de Lanzarote, l’hôte primitif, c’est César Manrique.
C’est par les journaux que j’ai appris la mort de César Manrique. Pas parce que j’étais un garçon minutieux, même si je l’étais, mais parce qu’en ce mois de septembre de 1992, nous faisions nos études en dehors de l’île. Je dis, nous étions, parce que certains d’entre nous avions eu la chance d’agripper la vague du puissant progrès insulaire et nous nous étions proposés de faire nos études universitaires sur des terres un peu éloignées. Peut-être que l’innovant César avait aussi un peu sa part de responsabilité.
Manrique de Lanzarote connu dans le monde entier
Moi je savais que Manrique était « le » plus prestigieux de mon Île, parce que beaucoup de mes camarades péninsulaires étaient les premiers à me le rappeler quand je faisais référence à mon origine : Ah ! la terre de César Manrique ! me disaient-ils. Parfois je pense qu’ils ne connaissaient Ténérife que parce que leurs parents ou leurs oncles y étaient allés en voyage de fiançailles ; ou peut-être parce que le CD Tenerife de Valdano avait piqué deux ligues au Real Madrid (91/92 y 92/93). Je ne sais pas…
Enfin. Certains d’entre nous, natifs de Lanzarote, nous avons appris l’authentique valeur de l’artiste lorsque nous avons vu la répercussion médiatique que sa mort a soulevé en dehors de l’Île. Je me rappelle encore lorsque je tenais les pages, moitié surpris et moitié impatient, du « Diario 16 », dédiées à la figure du plus universel des « conejeros ».
Le lendemain de sa mort, le samedi, Carmelo Martín écrivait dans le journal El País : « Auteur d’importants projets d’urbanisme situés dans des zones touristiques et rurales de l’archipel, Manrique a révolutionné l’offre de loisirs et a mis en œuvre un nouveau style esthétique qui a captivé la critique et les artistes du monde entier ».
C’était en même temps douloureux et passionnant. C’était douloureux parce que je ne pouvais pas être avec les miens. Mais parfois je pense que c’était bien pour arriver à connaître un peu mieux l’emballage de personnages de la sorte. Non seulement César, mais les Centres d’art, culture et tourisme de Lanzarote sont aussi un étendard des natifs de Lanzarote lorsqu’ils restent un moment loin des Îles, pour une raison ou une autre ; parce c’est précisément un des signes d’identité de notre terre volcanique, qui laisse son empreinte chez ceux qui nous connaissent pendant quelques jours ou quelques semaines. C’est vrai, moi je suis monté dans la voiture de César Manrique, cette toute nouvelle Jaguar ; dans mes souvenirs elle est de couleur verte; si, celle-là même depuis laquelle plus tard il nous a dit Adieu à cause d’un accident fatal. Je ne me rappelle pas de manifestations culturelles avec Manrique à El Almacén, ni de fêtes de carnaval à Arrecife, parce que à cette époque-là, j’étais encore un habitant de l’archipel de Chinijo et parce que, comme je l’ai déjà dit, je suis un villageois.
Je suis monté dans la voiture de César Manrique pour lui montrer le chemin, dans cet enchevêtrement de rues étroites, jusqu’à la maison d’un de ses amis qui vivait dans une villa du Majuelo, dans les environs de la Villa de Teguise.
On jouait au ballon au milieu de la rue Timanfaya, et il est passé par là en nous demandant où vivait ce monsieur, dont je ne me rappelle plus le nom, et on lui a dit que oui, on savait où c’était. Ils nous a demandé si on pouvait lui indiquer l’endroit, je lui ai dit que oui et que ce n’était pas loin. Je suis monté, on a tourné dans quelques rues et on est arrivé, je suis descendu et il m’a donné 100 pesetas… On s’est goinfrés de boules de gomme. C’est à cette époque-là qu’on a su que César était le meilleur.